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Willy Brouillard le Flicard
2 mars 2010

Je suis content que vous soyez venus, que vous

Je suis content que vous soyez venus, que vous soyez là….

Je rentre, une nuit, encore une nuit, des visages, des cries, la vie des autres en pleine figure sans jamais de preambule, j'eteins la lumiere de mon salon, l'ecran diffuse son rassurant hallo bleuté. Ici je laisse à nouveau un mot, à vous autres fantomes de mes nuits tant de fois je vous ai visité, invisible compagnon de mes insomnies, diluant l'alcool qui coule dans mes veines, et ce soir encore une fois je prend la parole.

Musique de fond, quelque chose de tres doux ce soir, des paroles que je connais presque par coeur, que je comprend.

Je me laisse aller avant de dormir, le masque du travail fond sur mon visage, je redeviens moi.

Je ferme les yeux et dans la nuit de mes paupieres, je me souviens de ses cheveux dans le vent.

La bassesse, la violence, la haine, la crasse tout cela s'envole avec ses cheveux qui dancent dans le vent.

Elle a dix huit ans, c'est jeune encore jeune à mon gout pour porter un enfant, surtout quand cet enfant est imposé par ses parents et deja vendu a quelqu'un d'autre. C'est à cela que s'est resumé l'amour d'une mere ce soir, imposer à sa fille d'etre une mere porteuse, et vendre avant meme sa naissance le pauvre gosse. Pas encore né déja une marchandise. Je n'ai meme pas osé demandé comment la petite avait été fecondé, trop peur de la reponse. Le bébé n'a pas passé l'examen de toute façon, mal formé un truc du genre, pas comme il faut, devenu un probleme, pensez donc elle avait promis un bébé en bon etat, deux bras de jambes pas de mousse dans les oreilles ou de chromosome en plus, pas une marchandise avariée, donc on efface tout ça et on recommence.

Voila ma nuit, une gosse qui se fait avorter a l'aiguille à tricoter dans les toilettes d'un appartement insalubre, qui fuit sa mere tortionnaire la robe pleine de sang la douleur qui lui tord le ventre, recupérée par des pompiers rentrant d'un feu de voiture. Et nous que l'on appelle au secours, retrouver le foetus, vite, peut etre viable... qui sait... Si la chasse d'eau n'a pas ete tirée.

La porte de l'appartement au 8 eme d'une tour de 22 etages, des coups de plus en plus violents, "ouvrez POLICE", menace dans la voix, elle comprend la mere, elle ouvre, elle a pas vraiment le choix, on rentre vite, on la bouscule, on fouille l'appartement, les toilettes, tout ce sang meme pas bien essuyé, l'odeur d'excrement, l'odeur de l'humanité qui part a vau l'eau.

Cuvette des toilettes noir de je n'ose imaginer quoi...

Dans le couloir derriere moi, elle bafouille la mere, demande pourquoi on crit, pourquoi on fait tout ce bordel chez elle, presque indignée. Le sang dans les toilettes? sa fille sans doute, petite trainée, elle sait pas, un foetus? Quelle drole d'idée.

Je marche dans l'appartement, je regarde autour de moi, la crasse, la vaisselle qui deborde de l'evier, le repas de l'avant veille qui commence à pourrir sur la table, deux gosses qui dorment dans le salon à meme le sol sur la moquette elimée, des insectes de partout, mouches, cafards, et autres... La salle de bain pour me laver les mains, la lumiere fait fuir dans le trou d'evacuation de l'evier un armée silencieuse de cafard. Pas d'eau, coupée depuis des lustres. Je quitte l'appartement, trouver de l'air moins putréfié. Il y a du sang dans le couloir, le vide-ordure, on comprend tous en meme temps, les escaliers, le local poubelle.

Petit sac en plastique sanguinolant reposant sur des dechets du quotidien, au millieu des coquilles d'oeufs et des pellures de bananne. Il n'aura jamais de nom, c'est peut etre mieux ainsi...

Je ne juge pas, en 15 ans de ce boulot je n'ai presque jamais jugé mes freres humains, et pourtant ces quelques années m'ont fait croiser toute sorte de turpitude...

Ce n'est pas l'ethnie, l'origine sociale, la couleur de peau, la religion, qui aboutit a nous faire decouvrir au beau millieu de la nuit le petit cadavre d'un foetus dans une poubelle en plastique, c'est l'homme, sa betise, sa mechanceté ou son inconsequence.

Je ne fais pas de moral, je suis l'etre le plus mal placé pour en faire de toute façon, mais...

Mais si je me moque eperdument ce soir de ce petit bout de viande grisatre dans son sac en plastique congelation, je pense a la vraie et seule victime de tout cela, celle qui vit, à qui on a vendu la chaire, et que l'on a torturé, celle qui retournera dans cet enfer une fois soignée pour peut etre recommencer...

Dans ton lit d'hopital petite soeur dors bien le monde peut attendre demain... Moi j'ai l'image de ses cheveux dans le vent et toi que te reste t'il ce soir?

Dormez bien les fantomes

valat0739Bonsoir les fantômes...

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Commentaires
Willy Brouillard le Flicard
  • Assis sur un banc au bord de la seine, emitouflé de nuit. De la musique dans la tete, un peu de poesie, des larmes de Jazz. Je cherche quoi faire de mes dix doigts puisque decidement je ne fume pas.
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